Dans le cadre de la Nuit Blanche 2023, le Mémorial de la Shoah invite l’artiste plasticien Melik Ohanian à montrer un ensemble d’oeuvres, réunies pour la première fois et dans une configuration inédite, évoquant le génocide des Arméniens.
La proposition s’articule autour de trois oeuvres majeures, un documentaire et une projection extérieure, pour rendre hommage à la mémoire de ceux, disparus ou meurtris, dans ce moment tragique de l’Histoire.
SUR LA FAÇADE DU MEMORIAL
REMEMBER, IT WAS TOMORROW –
Sur la façade principale du Memorial de la Shoah, une animation vidéo réalisée à partir du titre de l’exposition, énigmatique comme un oxymore, et de sa traduction en arménien, interpelle les passants et les invite à entrer un moment dans la crypte pour y découvrir les oeuvres de Melik Ohanian.
DANS LA CRYPTE
3451 larmes de béton et plomb. OEuvre adaptée temporairement pour la crypte du Mémorial de la Shoah. Avec l’aimable autorisation de l’artiste et de la Galerie Chantal Crousel, Paris
Composées d’un mélange de ciment et de résine, 3451 «larmes de béton», comme autant de kilomètres séparant Paris de Erevan en Arménie, sont suspendues grâce à des fils d’acier, rideau de pluie diaphane tombant au-dessus de l’étoile de David en marbre noir. Ruissellement ou envolée, l’oeuvre partant du puits de lumière sous le cylindre de bronze du parvis, crée un lien vibratoire dans l’espace, un lien spirituel et presque tellurique, entre ces monuments de mémoire, entre les mémoires des génocides, entre les terres d’asile et d’exil. À travers l’image paradoxale de larmes en béton, Concrete Tears, aérienne et dense, matérialise l’émotion, et le drame dont elle émane, et se fait le lieu d’un « passage de l’émotion à la conscience »*
*(D’après un entretien avec Garance Malivel.)
120 exemplaires de l’édition originale du livre Mémoires du génocide arménien de Janine Altounian et Varham Altounian (PUF, 2009), passés à la déchiqueteuse. 24 reproductions fac-similé couleurs du Journal de déportation de Vahram Altounian (1920-1921). Ecran tactile et livre numérisé. Collection du MacVal, Musée d’Art Contemporain du Val de Marne – N° d’inv. : 2019- 2370 (1-26)
En mars 2014, Janine Altounian, auteur du livre Mémoires du génocide arménien — Héritage traumatique et travail analytique apprend à Melik Ohanian qu’elle souhaite racheter les derniers exemplaires invendus de son ouvrage avant que ceux-ci ne passent au pilon. L’artiste lui propose alors d’acquérir une partie de ces exemplaires pour en faire une oeuvre d’art. Pulp Off devient une installation en trois temps, donnant au livre une seconde vie. Paradoxalement, en le décomposant, il en réinvente la valeur. Il invite à perpétuer ce témoignage et son analyse comme un élément constitutif del’identité d’un peuple. Avec Pulp Off, Melik Ohanian offre aux visiteurs l’occasion de découvrir un témoignage hors du commun (dont l’original est entré au Departement des Manuscrits de la BnF en 2022) et le repousse hors de l’oubli.
STREETLIGHTS OF MEMORY — WOOD MOLDS – 2023
Une dizaine d’éléments ayant servis à la réalisation des Réverbères de la Mémoire, oeuvre pérenne installée dans le Parc Trembley à Genève en 2018. Les Réverbères de la Mémoire (2010-2018) ont été produit par la Fondation Armenia, Genève et le FMAC, Ville de Genève.
L’installation présentée dans la crypte constitue une évocation inédite des Réverbères de la Mémoire, commande d’une oeuvre mémorielle pour l’espace public qui avait été faite à Melik Ohanian par la ville de Genève en 2010 et soutenue par la communauté arménienne genevoise. Elle a été installée de manière pérenne en 2018 après plusieurs années de controverses et de luttes liées au fait historique dont elle s’inspire.
Cette oeuvre aura connu un «double-état». En 2015, alors que son implantation est contestée à Genève, elle est exposée, sous le titre Streetlights of Memory – A Stand by Memorial, 2010/2015, de manière « démantelée » dans le Pavillon de la République d’Arménie à la 56e Biennale de Venise (qui remportera le Lion d’Or du meilleur pavillon national). L’oeuvre trouve finalement sa place dans le Parc Trembley de Genève et est inaugurée au mois d’avril 2018. Elle reçoit en 2019 le Prix Visarte à Zurich.
À L’AUDITORIUM EDMOND J. SAFRA
Séquences d’un film documentaire en cours de montage, réalisé par Melik Ohanian. 50mn, 2010-2023. Images Vartan Ohanian. Production Melik Ohanian Studio.
« Le cheminement du projet et les oppositions rencontrées font partie intégrante de l’oeuvre. De manière analogue, ce parcours rejoue ce qu’ont subi les Arméniens durant et après le génocide. Toute cette polémique politique et juridique autour du projet donne à l’oeuvre sa propre réalité et sa propre vie » – Melik Ohanian
Interrogeant les multiples sens du monument commémoratif, le film documentaire MEMORY, suit la production et de l’installation des Réverbères de la Mémoire (2010-2018) à Genève. Diffusé pour la première fois et sous une forme inachevée à l’occasion de cette exposition, il retrace, dans une série de rushes et de séquences, la genèse complexe de cette œuvre controversée, qui avait été commandée à l’artiste par la Ville de Genève en 2010 en hommage aux Arméniens et aux Suisses qui se sont mobilisés en leur faveur dès les premiers massacres.
1ère séance à 18h30, présentée par Melik Ohanian
Puis projection du film en continu jusqu’à 2h du matin, nuit du 3 au 4 juin 2023
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MELIK OHANIAN
Né en 1969 à Lyon, Melik Ohanian est un artiste français, plasticien et vidéaste, vivant entre Paris, Issoudun et l’Arménie, dan le cadre de son projet permanent Datcha Project – Zone of No Production, initié en 2005.
Bien que toute l’oeuvre de Melik Ohanian n’y soit pas consacrée, une partie de son corpus artistique investit avec force et émotion la memoire et l’histoire du génocide des Armeniens. Il produit donc par ailleurs une reflexion élargie sur les notions de territoires, physiques et conceptuels, s’articulant autour de la question du temps, intégrant des dimensions historiques, politiques ou idéologiques. Nourrie autant par les sciences que par la philosophie, son oeuvre se développe au travers d’une multiplicité de médiums, interrogeant les modes de représentation de l’exposition et dépassant souvent les cadres habituels de l’image dans ses dimensions spatiales et temporelles.
Son travail a remporté plusieurs prix, parmi lesquels le Prix Marcel Duchamp, en 2015, le Lion d’or du Meilleur Pavillon National dans le cadre de l’exposition collective du Pavillon arménien à la 56e édition de la Biennale de Venise, en 2015, et le prix Visarte, en 2019.
Coordination curatoriale : Marie Deparis-Yafil
Le Mémorial de la Shoah remercie pour leur précieuse collaboration :
Melik Ohanian
CHD Art Maker
La Galerie Chantal Crousel, Paris
La Galerie Dvir, Paris, Bruxelles, Tel Aviv
Le MacVal, Musée d’Art Contemporain du Val de Marne
Melik Ohanian remercie :
Janine Altounian, Sona Khachikyan, Vartan Ohanian, Michèle Freiburghaus,
FMAC Ville de Genève, Vahé Gabrache et la Fondation Armenia.
TOUTES LES LEGENDES PHOTOS
Couverture – Melik Ohanian, Remember It Was Tomorrow, 2023 © Melik Ohanian ADAGP, Paris 2023
CONCRETE TEARS — 3451 – 2012 – Photo : Marc Domage © Melik Ohanian ADAGP, Paris 2023
PULP OFF – 2014 – Collection du MacVal, Musée d’Art Contemporain du Val de Marne – N° d’inv. : 2019- 2370 (1-26) © Melik Ohanian ADAGP, Paris 2023
STREETLIGHTS OF MEMORY — WOOD MOLDS – 2023 © Melik Ohanian ADAGP, Paris 2023
STREETLIGHTS OF MEMORY – A STAND BY MEMORIAL, 2010/2015 © Melik Ohanian ADAGP, Paris 2023
Les œuvres de l’exposition seront visibles dans la crypte jusqu’au 25 juin 2023, et de 19 h à 2 h le 3 juin dans le cadre de la Nuit blanche.