Adolphe « Addy » Fuchs était un grand témoin de la Shoah. Déporté à l’age de 16 ans, il était devenu un passeur de mémoire actif auprès de milliers d’élèves et un fervent militant du sport populaire. Nous lui rendons hommage.
Addy Fuchs naît à Paris en 1926 à l’hôpital Rothschild. Fils unique de deux Juifs polonais ayant fuit les pogroms et la misère de leur pays, il grandit dans le 12e arrondissement de Paris, rue de la Mare. Dans la famille, on parle yiddish mais on apprend le français. En 1937, ils déménagent dans le 10e arrondissement, la mentalité y est plus bourgeoise, Addy intègre le lycée Colbert, il est bon élève, particulièrement doué pour les mathématiques.
En 1939, son père est mobilisé et ils se déclarent comme Juifs aux autorités. Addy Fuchs va alors porter l’étoile et subir les interdictions et humiliations. Il échappe à la rafle du Vél’ d’Hiv’ avec ses deux cousines, son oncle et sa tante, et passe en zone libre par Vierzon. D’abord cachés puis dénoncés à la Gestapo, ils sont arrêtés avec de faux papiers et enfermés à la Kommandantur puis à la prison d’Orléans, et enfin à Pithiviers. Addy est déporté à Drancy avec ses cousines, puis finalement à nouveau déporté à Pithiviers avec d’autres jeunes. Dans leur baraque, ils jouent aux dames et aux échecs.
Le 21 septembre 1942, Addy Fuchs est déporté à Auschwitz par le convoi n°35. Au sous-camp de Cosel, à moins de 100km d’Auschwitz, il fait partie de la première sélection avec environ 200 autres jeunes hommes. Il y travaille en temps que détenu sur des terrassements et des rails. Addy se souvient de ces mots du chef de camp allemand : « Ici, vous n’êtes pas sur le boulevard des Capucines, vous êtes dans un camp de concentration, vous rentrez par la porte et sortez par la cheminée ». En décembre, il est transféré à Blechhammer, un camp de travail regroupant environ 4000 Juifs et des prisonniers de guerre. La discipline y est très dure. Les sélections et fouilles sont permanentes. Immatriculé en avril 1944, Addy Fuchs travaille le ciment, les briques et la soudure. Il sera protégé par un contremaître allemand, les SS sont de plus en plus sévères, frappent et tuent, il sera lui aussi frappé par un kapo.
Le 21 janvier 1945, ils quittent le camp et entament une « marche de la mort ». Les 4000 détenus font 250 kilomètres jusqu’à Gross-Rosen, 2000 sont assassinés. Les survivants sont emmenés dans des wagons et seront découverts plus tard sous les bombardements. Addy est transférés au camp de Buchenwald, puis de Langestein.
« J’espère que les jeunes d’aujourd’hui seront capables de construire un monde avec moins de haine ». Addy Fuchs
Addy Fuchs est libéré le 21 avril 1945, il pèse 33 kg et est blessé à l’épaule. Le 4 mai 1945, il retrouve ses parents. Il reprend du poids mais tombe malade. Pour se remettre, il fait du sport et devient militant communiste. Il rencontre Ida, une fille de déporté, avec laquelle il aura trois enfants. En 1951, il retrouve ses camarades des camps avec qui il créera l’Amicale de Blechhammer. Militant de la mémoire, notamment au sein de l’Union des déportés d’Auschwitz, Addy Fuchs a témoigné pour la Fondation Spielberg en 1995 ainsi que de très nombreuses fois et depuis longtemps au Mémorial de la Shoah pour les publics scolaires. Il se rendait également dans les établissements scolaires avec son « matériel pédagogique » : une étoile jaune, une veste de prisonnier, une carte d’identité estampillé « Juif ».
Addy Fuchs fut également un grand promoteur du sport, notamment du volley-ball, à la Fédération sportive gymnique du travail (FSGT), née dans le mouvement socialiste au début du siècle, et rattaché également au Parti communiste par la suite.
Toutes nos pensées vont à ses proches.