Milo Adoner, rescapé de la Shoah et témoin infatigable, s’est éteint à l’âge 94 ans
Né en 1925, Samuel Emile, dit Milo Adoner est le 4ème enfant d’une grande fratrie de sept enfants. Sa famille juive-polonaise originaire de Varsovie a émigré en France durant l’entre-deux guerres, son père est artisan maroquinier, travaillant à domicile.
Très attaché au quartier où il a grandi, il avait été scolarisé à l’école de la rue des Hospitalières Saint-Gervais dans les années 1930, obtenant en 1937 son certificat d’études « avec mention ».
Milo a 17 ans lorsqu’il est arrêté chez lui à Paris le 23 septembre 1942, avec sa famille et 112 juifs demeurant au 10-12 rue des Deux-Ponts dans le quartier de l’Ile Saint-Louis. L’une de ses sœurs échappe à la rafle. La famille est conduite au camp de Drancy et déportée quelques jours après par le convoi n°38 (28 septembre 1942).
Le convoi s’arrête à Kosel, à quelques kilomètres d’Auschwitz, où Milo est séparé des siens. Ses parents et quatre frères et sœurs vont directement au camp d’Auschwitz-Birkenau où ils sont assassinés. Sélectionné avec son frère Salomon pour les travaux forcés, Milo est tatoué du numéro B10602.
Il a ensuite connu les camps de Birkenau, Blechhammer, Monowitz (Auschwitz III) qu’il évacue le 18 janvier 1945 par une Marche de la Mort jusqu’au camp de Gross Rosen ; Onze jours de froid et de neige auxquels Salomon n’a pas survécu. Il est transféré au camp de Buchenwald puis à Niederkirch. Il s’évade le 4 avril 1945 et est libéré le 11 avril. Rapatrié avec des prisonniers de guerre français le 30 avril 1942, sa déportation aura duré 982 jours.
« Nous nous savions condamnés. La mort nous talonnait. Les fours ronflaient à tout-va. Néanmoins, nous tenions. La volonté de vivre. »
À son retour à Paris, il trouve l’appartement familial « occupé ». Mais sa sœur Charlotte, la seule des sept enfants Adoner à avoir échappé aux grandes rafles, est en vie : elle s’est réfugiée à Marseille pendant le reste de la guerre.
Il épouse Suzy, fille de déporté, avec il fondera une famille. Milo Adoner était un témoin infatigable, il ne cessait de témoigner, même si l’évocation du sort de sa famille lui est resté très douloureux. Il a publié son témoignage dans un ouvrage collectif : Les derniers témoins, paroles de déportés recueillies par Jean-Pierre Allali, éditions Safed 2004.
Il a été Vice-Président de l’Amicale des déportés de Blechhammer puis son Président, en 2000. Après l’absorption de cette association par l’Amicale d’Auschwitz devenue Union des Déportés d’Auschwitz (UDA) en 2004, il devient l’un des Vice-Présidents de l’UDA. Il était également très impliqué au sein de la communauté de la place des Vosges au coté du Rabbin Liché, puis du grand Rabbin Olivier Kaufmann
En 1990, il obtiendra que Joseph Migneret, le directeur de l’école de la rue des hospitalières Saint Gervais qui avait été son instituteur soit reconnu Juste parmi les nations pour avoir caché pendant un an et demi une famille juive dans son appartement . En 2019, à son initiative, la Mairie de Paris nomme le parvis de cette école « Le parvis des 260 enfants ».
En 2016, à l’occasion du 70ème anniversaire de la découverte des camps, Milo Adoner faisait partie des 29 récipiendaires de la promotion spéciale « Mémoires de la déportation » ayant reçu la Légion d’Honneur.
Avec Milo Adoner, c’est une grande figure qui disparait, une figure du Pletzl, un militant de la mémoire très attaché au Mémorial de la Shoah qui nous a quittés. Toutes nos pensées vont à son épouse Suzy, à ses deux filles Arlette et Laura, à toute sa famille et à ses proches.
Ses obsèques, conduites par le Grand Rabbin Olivier Kaufmann, auront lieu au cimetière de Bagneux le vendredi 6 mars à 13 h .