De l’immigration légale…

Au cours d’une visite dans les camps de D.P., les membres de la commission d’enquête anglo-américaine sur la Palestine découvrent ce que cette terre symbolise pour la plupart des réfugiés juifs. Sur 19 000 personnes interrogées dans le cadre d’un sondage effectué par l’UNRRA en mai 1946, 18 700 d’entre elles répondent par le choix de la Palestine comme pays d’accueil. Derrière le mot Palestine se profile l’image du foyer retrouvé en opposition à l’errance, le sentiment de sécurité en réponse à l’antisémitisme qu’ils ont enduré. D’ailleurs les mouvements sionistes sont fortement représentés dans les camps de D.P. et une structure de vie communautaire similaire à celle du Kibboutz est parfois mise en place. Afin de préparer les jeunes à l’émigration en Palestine, des fermes agricoles sont également créées avec l’aide des autorités d’occupation.

Sionismes

En 1939, le Foyer national juif en Palestine (Yishouv) rassemblait plus de 500 000 Juifs dont la puissance mandataire britannique sur la Palestine reconnaissait en 1937 qu’ils étaient prêts à s’autogérer sous une forme étatique. Cette population n’était pas une communauté juive de plus, mais l’embryon d’un Etat qui disposait déjà de la plupart des institutions sociales, économiques, culturelles, militaires et politiques qui le rendaient viable.

S’il y a toujours eu une présence juive en Eretz Israël, l’apparition de l’antisémitisme moderne, la naissance d’un mouvement sioniste politique, la dislocation de l’Empire ottoman, puis l’avènement du nazisme vont provoquer l’intensification de l’immigration juive entre la fin du XIXe et la Seconde Guerre mondiale.

Lors de la première vague d’immigration, entre 1881 et 1903, ce sont 12 000 personnes qui gagnent Eretz Israël, des pionniers qui fuient les pogroms et les persécutions antisémites de Russie, mais sont aussi, et surtout, soucieux d’une renaissance nationale juive.

La deuxième vague, entre 1904 et 1914, voit l’arrivée de 40 000 personnes, principalement des militants et des sympathisants socialistes engagés dans la révolution russe de 1905.

Dans les années 1915-1923, 35 000 personnes gagnent Eretz Israël fuyant les exactions antisémites qui ont causé la mort de plus de 100 000 Juifs massacrés par les bandes ukrainiennes et par les armées blanches au cours de la guerre civile qui suit la prise du pouvoir par les bolchéviques en octobre 1917.

De 1924 à 1927, 80 000 personnes, principalement venues de Pologne et fuyant les difficultés économiques, s’établissent en Palestine.

Pour la seule année 1933, alors qu’Hitler accède au pouvoir, près de 35 000 Juifs arrivent d’Allemagne en Palestine. Au total environ 180 000 immigrants légaux venus d’Autriche, de Tchécoslovaquie, gagnent la Palestine entre 1929 et 1939, auxquels s’ajoutent 17 000 clandestins, en trois vagues celle de 1933, celle de 1935 provoquée par la promulgation des lois raciales de Nuremberg et la « Nuit de cristal » en 1938. Parmi ces Juifs allemands, environ 20 000 d’entre eux arrivent dans le cadre d’un accord signé en août 1933 entre les dirigeants de l’exécutif sioniste et le ministère de l’économie du Reich. D’un côté les nazis, qui souhaitent construire une Allemagne sans Juifs, permettent aux Juifs qui le souhaitent d’immigrer en emportant une partie de leurs capitaux, de l’autre le mouvement sioniste qui veut inciter le plus grand nombre de Juifs menacés à rejoindre le Foyer National juif.

Le Livre blanc

Depuis le traité de San Remo (1920), l’Empire ottoman est disloqué et la Palestine est gérée par les Britanniques, auxquels la SDN (Société des Nations) certifie le mandat en 1922.

A la suite des différentes tensions judéo-arabes, qui se traduisent par des manifestations, des protestations, mais aussi des émeutes meurtrières qui éclatent dès le début des années 20, les autorités britanniques font les frais d’une politique ambigüe et reviennent sur les engagements pris lors de la déclaration Balfour en 1917. Alors que la guerre parait inévitable, la puissance mandataire britannique ne veut pas courir le risque de voir les populations arabes se tourner vers le Reich nazi.

Le Livre blanc de Malcolm Mac Donald, publié le 17 mai 1939, limite pour cinq ans à 75 000 personnes le nombre d’immigrants juifs, 10 000 par an et 25 000 visas accordés à titre exceptionnel.

Par le Livre blanc, les autorités britanniques décident de mettre fin à la politique de partition de la Palestine en deux Etats distincts et d’aller vers un Etat arabe unitaire au terme du délai de 5 ans.

Avec la menace qui pèse sur les Juifs d’Europe, l’intensification de l’immigration est une priorité pour le mouvement sioniste. Des réfugiés s’entassent sur des bateaux affrétés par la Haganah (l’organisme de défense armée des Juifs de Palestine) et tentent de rejoindre clandestinement la Palestine.

Les forces navales britanniques n’hésitent pas à intercepter et à renvoyer vers leurs ports de départ, généralement Constanza en Roumanie les bateaux chargés de Juifs pour lesquels la Palestine est le dernier espoir : le 25 mars 1939, le Sandru avec à son bord 269 réfugiés, le 6 avril l’Astir avec 698 réfugiés, le 23 avril l’Assimi avec 250 réfugiés. De nombreux immigrants sont également internés au camp d’Atlit situé à côté de Haïfa dans le nord d’Israël ou transférés à l’Ile Maurice.

 

Le bateau United States, États-Unis, en provenance de Bari en Italie accoste sur les plages de Nahariya

Le bateau United States, États-Unis, en provenance de Bari en Italie accoste sur les plages de Nahariya avec à son bord 700 passagers clandestins dont 40 enfants.
La Haganah réussi à cacher près de 530 personnes, tandis que les autres sont arrêtées et placées dans un camp de personnes refoulées. Palestine, 1er janvier 1948.
© Bundesarchiv.

Visite de David Ben Gourion dans le camp de personnes déplacées de Zeilsheim, Allemagne, 1946

Visite de David Ben Gourion, président de la communauté juive de Palestine, dans le camp de personnes déplacées de Zeilsheim. Allemagne, 1946.
David Ben Gourion se rend à plusieurs reprises dans les camps de personnes déplacées entre 1945 et 1946, pour encourager l’émigration des juifs rescapés vers la Palestine.
© Mémorial de la Shoah.