PARTIE I LA FORTERESSE NAZIE À LA VEILLE DES GRANDES OFFENSIVES DE L ÉTÉ 1944
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en place par le gouvernement de Vichy. Le chef de la Milice, Joseph Darnand, qui a prêté ser- ment à Hitler, devient en janvier 1944 secrétaire général au Maintien de l ordre. Des miliciens sont nommés dans les régions à la tête des forces de police, et des cours martiales aux mains de la Milice sont instituées pour juger les résistants de façon expéditive : elles prononcent près de 200 condamnations à mort en l espace de six mois. Des unités de la Milice participent égale- ment aux côtés des Allemands aux opérations menées contre les maquis, aux Glières, dans le Jura et dans le Limousin.
prescrit que les francs-tireurs capturés avec une arme seront fusillés et non plus livrés aux tribunaux militaires. Tous ceux qui sont pris hors flagrant délit doivent être condamnés à mort à la suite de procès expéditifs et rapidement exécutés. Lors de chaque opération répressive, des résistants et/ou des notables locaux sont systématiquement abattus et les autres suspects sont arrêtés et rapidement déportés vers les camps du système concentrationnaire. Des enrô- lements de force pour le travail obligatoire sont également opérés. La radicalisation répressive a ainsi largement précédé le débarquement de Normandie.
LA TRAQUE DES RÉSISTANTS ET DES PARTISANS EN FRANCE La répression allemande à l égard des résistants connaît une inflexion importante début 1944. L occupant craint en effet que la Résistance n apporte une aide cruciale aux Alliés lorsque aura lieu le débarquement qui se précise sur les côtes françaises, comme l explique le rapport rédigé à l attention de Hitler au printemps 1943 par Ernst Kaltenbrunner, chef de l Office cen- tral de la sûreté du Reich (RHSA). Le nombre croissant de réfractaires au STO qui rejoignent les maquis dote les organisations résistantes de troupes susceptibles de passer à l action le jour J. Dans ce contexte, la répression se radicalise. Alors qu ils n étaient guère interve- nus contre les premiers maquis constitués en 1943, les Allemands organisent à partir de l hiver 1944 de véritables opérations militaires dans l Ain (opération Korporal du 5 au 13 février), la Haute-Savoie (opération Hoch Savoyen, visant le maquis des Glières fin mars), le Limousin (colonne Brehmer, du nom du général qui la dirige, entre le 25 mars et le 15 avril), ou l Ain et le Jura (action Frühling du 7 au 18 avril). Pour lutter contre la Résistance, les Allemands profitent également de la montée en puissance de l État milicien mis
LA GÉNÉRALISATION DES ACTIONS PUNITIVES
L e 1er décembre 1943, Joseph Goebbels, le ministre de la Propagande du Reich, fait le constat qu à l Ouest, « tout bouillonne » : une
partie de la jeunesse française prend le maquis et il faut donc se préparer à une « guerre de par- tisans », comme celle qui se déroule déjà à l Est. Le 8 novembre 1943, face à l imminence d un important débarquement allié, un ordre de Hit- ler a déclaré le front de l Ouest « prioritaire ». L urgence impose des méthodes de moins en moins « légales », de plus en plus expéditives. En Italie, où les Alliés ont mis le pied depuis 1943, des massacres visant les populations civiles ont déjà commencé dans les zones d opérations militaires. En France, dès janvier 1944, des bandes littorales sont classées en « zones de combat » (Kampf- zone) et des unités spéciales sont affectées pour sécuriser des territoires et les « nettoyer » des maquis. Pour cet objectif, quatre grandes opérations militaro-policières sont organisées entre février et avril 1944. De nouveaux res- ponsables de la police nazie, aux méthodes violentes expérimentées sur le front de l Est, arrivent en France. Dans ce contexte, la population civile, accusée de soutenir la Résistance, n est pas épargnée. Le 3 février 1944, le maréchal Hugo Sperrle, adjoint du commandant en chef sur le front de l Ouest, opère un tournant dans cette escalade des représailles : il donne l ordre à la troupe de répliquer en ouvrant le feu en cas d attaque « terroriste ». Les maisons abritant les parti- sans doivent être incendiées. Les commandants d unité ne seront pas punis pour avoir agi trop sévèrement. Le 4 mars 1944, un nouvel ordre
▲ Placard allemand de mise en garde contre l engagement dans la Résistance, France, 1944. © Mémorial de la Shoah
▲ Arrestation à Paris de résistants par la Milice française, dirigée par Joseph Darnand, le 2 juin 1944. © Mémorial de la Shoah
▲ Monument à la mémoire de sept combattants du maquis de Vabre, tombés le 8 août 1944. © Mémorial de la Shoah